Refait il y a peu, en ayant à l'esprit toutes les contraintes et obstacles rencontrés par ses auteurs, j'ai apprécié
Le Sorcier de la Montagne de Feu bien plus que je ne l'aurais cru possible. Le chemin linéaire de la première partie chez les "Farfadets", loin d'être une plaie, m'est apparu comme destiné à guider le joueur débutant, ce qui est toujours préférable à l'alternative consistant à l'expédier directement dans un labyrinthe inextricable ou au milieu d'une horde de monstres, n'est-ce pas ?
Et puis les chemins divergents ne tardent pas à faire leur apparition, chacun avec ses bons et ses moins côtés. Le cyclope de fer, ennemi incontournable si l'on veut terminer l'aventure avec le trésor, reste à mes yeux le seuil écueil de ce volume avec son Habileté de 10. Placer en amont l'épée procurant une Force d'attaque de +2 aurait été judicieux, tant le seul item de combat obtenu jusqu'ici, le bouclier croissant de lune, ne suffit pas à renverser le cours de la bataille. Si le joueur n'a pas eu la chance de tirer lui-même un 10 ou plus lors de la création de son personnage, c'est râpé.
Sur l'ensemble des LDVELH qu'ils ont écrits, je préfère généralement l'approche de Steve Jackson, à l'esprit plus tortueux et machiavélique que son comparse Ian Livingstone. Toutefois, sur ce premier volume, j'ai pris plus de plaisir sur la première partie de la montagne, signée Livingstone, que sur la seconde. Bien qu'elle démarre sur les chapeaux de roue (j'ai toujours trouvé fascinants les squelettes du hangar à bateaux, obnubilés par leur tâche, ou les outils magiques creusant seuls de nouvelles galeries), le labyrinthe en lui-même m'a plus gonflé qu'autre chose. Déjà que j'avais complètement oublié le chemin à prendre, je ne parvenais plus non plus à retrouver mes potes les nains réfugiés dans leur abri à taper le carton.
La confrontation finale avec Zagor est bien amenée (le petit vieux inoffensif de la couverture qui révèle sa véritable apparence pour surprendre le héros), comporte un éventail de choix bienvenus (de la confrontation basique contre un adversaire surpuissant à l'élimination directe grâce à la pierre du cyclope, en passant par la destruction du jeu de cartes), mais tout cela manque de sortilèges, le comble pour un sorcier surpuissant ! Jackson corrigera le tir avec Balthus dans La Citadelle du Chaos.
Je me suis également intéressé à la partie intrigue de l'ouvrage, puisque semblant d'intrigue il y a : d'un simple chasseur de trésor, le héros est appelé à se muer en justicier et en vengeur... mais seulement s'il est tombé sur les bons paragraphes ! En effet, le prisonnier rendu à moitié fou par ses geôliers et le nain torturé à mort sont tous deux des événements optionnels. Ils éclairent cependant l'aventure sous un nouveau jour lorsqu'on y prête attention et apportent un enjeu autrement plus dramatique qu'une simple cupidité à satisfaire.
Autre point d'intrigue auquel je me suis intéressé : à quel moment Zagor perçoit-il la menace que représente l'aventurier ? En est-il seulement conscient ? La salle aux tableaux pourrait être un bon indice : le portrait de Zagor jauge ce que vaut l'aventurier, tente de l'effrayer et peut même le blesser. Toutefois, la connexion entre le portrait et le sorcier reste limitée : si le héros brandit la pierre du cyclope devant le portrait, le véritable Zagor n'adapte pas ses défenses en conséquence, alors que la pierre lui est mortelle. J'en demande sans doute trop aux auteurs sur ce point, mais il est amusant de se poser des questions de ce genre avec un regard adulte sur le texte que, gamin, on avalait sans broncher. Et puis, je le rappelle encore une fois, j'ai passé un très bon moment dans cette nouvelle exploration de la Montagne de Feu. Certes, je me suis paumé comme un débutant dans le labyrinthe, mais même la frustration occasionnée a son charme.
Et puisque tout le monde poste ici sa petite référence imagée, la mienne sera d'ordre vinicole :
A consommer avec modération, bien sûr