Nils Jacket 1 - Nils Jacket contre l'Agent X

Allez hop, on ouvre le bal avec cette première critique sur cet opus, Nils Jacket contre l'Agent X.
Je préviens de suite, c'est du costaud, avec 900 §. Ici, pas de petits § de quelques lignes, ils sont plutôt longs et immersifs.
Nous interprétons donc Nils Jacket, détective privé de seconde zone, imper et chapeau mou, mais les concessions au clichés du polar noir s'arrêtent là, car ces aventures sont des enquêtes contemporaines et résolument modernes. Cet équilibre fonctionne bien, utilisant l'archétype du privé à la Mike Hammer, ou Marlowe de Chandler, qui nous est tous un peu familier, mais remis au goût du jour et ancré dans le présent.
Les fausses pistes sont légion et intéressantes à explorer, et c'est donc un livre à grande rejouabilité si l'on souhaite explorer tous les recoins et histoires parallèles. De ce côté, le défi est même très corsé. Amateur de puzzle policier, vous allez être servi ! L'auteur nous prévient bien que boucler l'enquête ne sera pas aisé et nécessitera plusieurs lectures, tant les pistes abondent.

Pour brouiller les pistes, nous avons une multitudes de mots clé qui sont récupérables suivant nos itinéraires, mais tous ne sont pas obligatoires pour gagner, loin de là. En fait ils agissent comme une mémoire des itinéraires parcourus. Leur grand nombre permet à l'auteur de tisser sa toile et de maintenir le lecteur dans le doute. Il est assez frustrant en lisant d'avoir l'impression que l'on est passé à côté de quelque chose d'important, mais il ne faut pas se décourager si l'on constate qu'on n'a pas tel ou tel mot clé, car son absence, encore une fois et contrairement à d'autres ldvelhs, n'est pas forcément synonyme d'échec. De plus, si vous avez l'impression d'être bloqué à des passages particuliers, l'auteur a pensé à vous en proposant une petite aide ponctuelle pour vous guider.

Du côté des bémols, il y a cette impression un peu frustrante d'avoir raté des pistes ou des mots-clé. Du coup, il faudra souvent retenter l'aventure. J'ai peu apprécié la gestion très serrée de l'argent et de l'essence qui nous oblige à des comptes d'apothicaire... surtout que l'on n'a pas la possibilité de recevoir une avance sur les frais (chose que j'ai trouvée assez peu vraisemblable).
La difficulté et l'investissement nécessaire pourront donc démoraliser certains, alors que d'autres seront comblés.

J'ai trouvé l'immersion très bonne, ce qui est vital pour ce genre d'enquête policière. On voit bien que l'auteur a soigneusement visualisé les scènes qu'il décrit, on a l'impression d'assister à la projection d'un film. Le rythme général est bon. Il y a aussi une très belle galerie de personnages secondaires. Enfin, l'humour est présent mais avec parcimonie et ne vient généralement pas gêner l'immersion, c'est à signaler car c'est un exercice souvent délicat.

Action, aventure, rebondissements, le cocktail fonctionne.
Si vous aimez les puzzles policiers, les challenges coriaces et les lecture de longue haleine, alors foncez !
Et admirez au passage la construction des intrigues et l'intérêt de la littérature interactive, où JFM s'affirme comme un architecte passionné et maître du ldvelh polar.
Je lui tire mon chapeau, en clin d'oeil à celui de Nils.


Note : 16 / 20

Bon, je me résous à faire une critique sans avoir pu encore achever cette enquête. Mais il faut dire qu'au bout d'à peu près vingt-cinq tentatives je pense avoir tout de même parcouru une bonne part de l'oeuvre, suffisamment pour m'en faire une idée claire.
Nils Jacket réussit un double tour de force: conjuguer ldvelh, enquête policière et univers contemporain sans se prendre les pieds dans le tapis. D'abord grâce une écriture de haut niveau, que je qualifierais de terriblement efficace. Ensuite par la cohérence de l'intrigue et surtout la pertinence psychologique des personnages, ce dernier point étant pour moi la vraie grande bonne surprise. Pour être simple, il y a de nombreux romans policiers qui n'arrivent pas à ce niveau. Je retiens en particulier une scène de séduction d'anthologie, un véritable moment de grâce rehaussé par des graphismes à couper le souffle (merci Megara).
Bref, on est captivé par l'histoire, même si bien sûr à la vingt-cinquième tentative c'est du réchauffé. On arrive ici aux points moins positifs du livre: une difficulté démentielle, avec un nombre de mauvaises pistes vertigineux, l'impression frustrante de piétiner encore plus chaque fois qu'on croit avoir avancé. Bon, j'avoue que j'aime bien ça en fait, mais il faut être prévenu: à côté, la Créature Venue du Chaos c'est open bar ! (je précise que je me refuse à accepter les indices, donc c'est ma faute aussi...)
L'autre point qui m'a un peu déçu, c'est qu'on s'attend à une énigme policière et on se retrouve plongé dans un (très bon) roman d'espionnage. Tant pis pour Sherlock Holmes et Hercule Poirot...
Je dois un grand merci à l'auteur pour avoir réussi à me passionner comme un adolescent pour cette aventure. J'ai retrouve les émotions de mes douze ans, avec évidemment une oeuvre plus adulte, mais ça méritait d'être souligné parce que je pense que c'est là que l'oeuvre touche son but. Arriver à proposer une version moderne des livres de notre enfance, en conservant l'excitation qui les caractérisait. Rien que pour ça Nils Jacket 1 mérite de figurer au panthéon des ldvelh au côté des illustres aînés.
J'aimerais même pouvoir dire que c'est le ldvelh le plus abouti que j'aie jamais lu, mais pour ça il faudrait que je déniche cette satanée fin et qu'elle ne soit pas décevante. La note qui suit pourrait donc être sujette à de (modestes) évolutions.

17/20

J’ai fait l’acquisition de "Nils Jacket" et je vous encourage à faire de même : pour peu que vous aimiez l’ambiance polar, vous ne serez pas déçu.
Bon, je vais évacuer ce qui fâche tout de suite, comme ça je terminerai sur une note positive : les bugs. Il y a ceux qui ne m’ont pas vraiment dérangé, et il y a ceux qui m’ont terriblement frustré au point de poser le livre et de remettre l’enquête au lendemain. Les bugs se situent au niveau de la liaison des paragraphes : on possède par exemple x objet, et au renvoi suivant, on nous dit que l’on ne possède rien, et le texte ne nous emmène donc pas dans la direction souhaitée.
Pour être honnête, si je faisais demain un pavé de 900 paragraphes, je ne serais pas à l’abri non plus de laisser des bugs dans mon livre. Faisons preuve d'indulgence.

Venons au point fort du livre : son immersion. Pour moi qui me réfugie dans l’imaginaire et joue avec les codes du médiéval / fantastique en tant qu’auteur, Nils Jacket est un tour de force. JFM nous plonge avec un soin maniaque dans les eaux de notre modernité, avec un paquet incroyable de personnages, d’objets et de descriptions.
Quand je pense qu’un simple coup de téléphone portable pourrait bousiller toute une enquête et tuer le suspense, je n’ose entamer un livre de ce genre et je salue bien bas le travail effectué par JFM.

Ce que j’ai également aimé, c’est l’aspect social traité avec finesse. Bien sûr, JFM n’invente rien : l’enquêteur privé qui picole au bureau et qui est fauché comme les blés, c’est un cliché. Mais il se joue une lutte des classes lorsque Nils Jacket se retrouve du jour au lendemain projeté dans l’univers de Serge Dassault. Un panier de crabes où se battent à mort diplomates corrompus, héritiers cupides et marchands d’armes sans foi ni loi. Toutes ces crapules riches à en vomir ne reculent devant aucune bassesse pour garder l’argent et le pouvoir qui va avec. Nils Jacket arrive au beau milieu, se bat à son tour et prend sa revanche sur leur monde. Lui, le misérable tout en bas de l’échelle sociale, qui ne vaut à leurs yeux guère plus qu’une fourmi… Il va les mettre face à leur médiocrité et les humilier une bonne fois pour toutes.

Enfin, il y a une quête annexe qui m’a donné encore plus de satisfaction que la quête principale : il s’agit d’une simulation de drague.
17/20