J'ai lu ce tome signé Cédric Zampini, commandé il y a quelques semaines à Posidonia en même temps que deux ou trois autres "HistoireS à Jouer" dont je parlerai peut-être en leur temps.
PRISE EN MAINL'objet livre a un beau format et 253 paragraphes touffus. Comme les autres titres de cet éditeur, le tome s'ouvre sur les remerciements aux contributeurs et se referme sur un livret de conseils au lecteur curieux de jouer l'histoire à plusieurs à la façon d'un jeu de rôle. Il y a également une liste de succès, qu'on peut débloquer (ou non) durant notre partie.
La couverture et les illustrations intérieures sont signées Anne-Sophie Van Nuvel, alias Purple Terebenthine (on a sa bio ainsi que celle de l'auteur après la page de faux titre). Je dois avouer ne pas être fan du fini de l'illu de couverture (travail sans doute numérique mais effet "dessin au crayon et à la règle") et que je n'ai aimé qu'une partie des illus intérieures : le denier du
1, l'escalier en colimaçon du
24, les parchemins du
40, la porte à tympans du
78, peut-être les menhirs du
133, l'héraldique du
143, le soldat du
248. Le reste m'a moins parlé. C'est curieux car j'avais apprécie le travail de Purple Terebenthine pour le recueil de poèmes en prose
Une gorgée d'absolu du même auteur chez Soc & Foc. Là, le pinceau était bien plus coloré et vif.
Recueil poétique Une gorgée d'absolu
La mise en page plus aérée que les Gallimard des années 80 est plaisante, sauf quand il y a trop de retours à la ligne au bout d'une phrase, comme au
233. Je ne suis pas fan des puces pour annoncer les choix (un petit rond en début de ligne).
Ces remarques de détail qu'on peut juger chichiteuses n'enlèvent rien au bon aspect et à la bonne prise en main de ce l'objet-livre à reliure souple, papier clair et tarif tout à fait catholique... si j'ose dire, vu le sujet !
QU'EST-CE QUE ÇA RACONTE ?On incarner un moine d'une abbaye de campagne, dans l'Anjou ou le Maine, j'avoue ne pas être fort en géo. Enfin par là-bas, quoi, là où il y a des invasions normandes, des Du Bellay qui chantent leur petit Liré (plus que le Mont Palatin), et puis la ville du Mans, où les chariotes du diable ne couraient pas encore les 24 heures locales.
Suite à une missive signalant des soucis peu clairs dans un monastère de la cité rouge, alias Le Mans, notre père abbé nous envoie enquêter. Il insiste : surtout, discrètement, hein ! On croit comprendre qu'il s'agit un peu d'une punition, beaucoup d'une mission suicide, pour avoir déplu audit abbé. La charité chrétienne a ses petits arrangements.
Ce qui est intéressant, c'est que le fait que notre personnage est un frère va beaucoup colorer le récit-jeu et l'écriture. Les combats ne sont pas interdits, mais il est fréquent de pouvoir les tourner par le dialogue, la compréhension, ou en choisissant de tendre l'autre joue.
Les Reliques de la cité rouge échappent au manichéisme, le héros ne juge pas, il veut aimer et aider. De plus, c'est un paisible campagnard, alors que son aventure se déroulera dans une ville où tout le monde est roublard. Un des personnages secondaires, Astride (prénom choisi par hasard ?), reprochera parfois à notre moine de ne pas assez avoir les pieds sur terre...
Rare image de notre héros face à la tentation et à Astride.
Bon, en fait non, elle veut devenir nonne. LES REGLESAssez classique, avec quelques
scores comme Capacités Manuelles, Instruction... En cas d'épreuve, on jette un dé, on ajoute notre valeur dans ce domaine et on compare à un seuil de difficulté indiqué dans le texte. De nombreux ajustements dans les règles évitent qu'un hasard malheureux vienne gâcher le jeu : on a des sorte de jokers divins, et on peut doter le personnage, à sa création, d'un trait de caractère qui modifie ses scores, afin de compenser un éventuel tirage catastrophique au départ. Il y a également des points de sauvegarde à plusieurs points-clé du jeu.
Les combats existent mais n'ont pas l'habituel côté bourrin : lors d'un confrontation contre 6 ou 7 gardes, on peut d'abord tenter d'en éliminer à distance, puis on ne combat les survivants que s'ils sont en surnombre par rapport au groupe réuni à ce moment-là par le héros (une team genre
Bad Batch ou
Douze Salopards : le fou d'explosifs, l'acrobate, le furtif, etc.). Il est d'ailleurs possible de gagner sans aucun combat ! C'est un des succès proposés.
On est une putain de teeeeeaaaaam !!! BILAN DE MA LECTURE, MON AVISLa richesse de la
documentation historique, la justesse du ton et le
bon équilibrage des règles sont les trois points forts de ce livre-jeu.
Autre point fort, la
multitude de PNJ assez fouillés, très hétéroclites, et qui amènent
des péripéties très différentes des classiques du genre. Un porcelet qui court dans une église, un fou qui court après des oiseaux invisibles, un alchimiste de l'extrême qui nous entraîne dans une chasse au trésor en pleine décharge publique...
A contrario j'ai été frappé du
caractère ténu du fil rouge de l'intrigue. On ne comprend pas complètement ce qu'on va faire au Mans. Une enquête sur quelque chose qui aurait peut-être eu lieu, quoi : mystère. Au fond, le frère à retrouver au monastère, les sales draps où ils s'est mis, tout ça est un peu flou et souvent laissé à l'arrière-plan. On a peu un de mal à visualiser notre quête principale et du coup, on se concentre plutôt sur les quêtes secondaires.
La lecture est agréable de par le ton lisse, calme, apaisé, et la maîtrise de l'écriture. Je recommande ce livre pour sa forte rejouabilité, ses personnages attachants et son atmosphère assez unique !
Note : la trinité X les pains multipliés sur 15/ 20 de messe