Les orientations sexuelles les moins courantes en livre-jeu

Que les LDVH des (pourtant permissives) années 1980 soient exclusivement "hétéronormés" n'est pas étonnant, c'était l'époque. Il suffit de se rappeler que l'homosexualité fût officiellement dépénalisée en 1981 (si ma mémoire est bonne) et qu'elle était encore, au début de cette décennie 1980, considérée comme maladie mentale.

Aujourd'hui, les temps ont changé et des jeux-vidéos acclamés comme Skyrim, Assassin's Creed ou Mass Effect permettent aux joueurs d'avoir des relations masculines aussi bien que féminines. Sans parler des aventures de super-héros où là aussi, certains personnages héroïques affichent sans problème leur préférence pour les gens de leur sexe. Pour Cluedo, qui se déroule à notre époque, dans une société où est établi le mariage gay, on peut sans trouver ça bizarre imaginer un couple d'hommes invité au manoir.
Soit dit en passant, la BD grand public me paraît plus frileuse dans ce domaine : dans la majorité de celles où l'homosexualité apparaît, ce sont souvent des couples de femmes comme dans les aventures de Jessica Blandy, XIII ou Largo Winch. Il semble que dessiner deux hommes nus dans le même lit dérange encore pas mal de dessinateurs... Même Murena qui se veut fidèle à la vérité historique du règne de Néron occulte soigneusement la bisexualité de l'empereur... On peut se rabattre toutefois sur Borgia ou Le pape terrible (même s'il est hautement improbable que Jules II et Michel-Ange aient été amants).

Pour en revenir aux gamebooks, on ne trouvera donc rien dans les LDVH de l'époque. Il faut se tourner vers les AVH.
En tant qu'auteur, j'ai toujours détesté dans les AVH ce côté courtois et bien-pensant, ces héros asexués, ces femmes chastes et ces guerriers vertueux. Donc chiants. Mes AVH sont assez sensuelles, la nudité et le sexe y sont présents, nudité masculine comme féminine. Dans Les Tambours de Shamanka, on peut passer un moment de plaisir à trois, dans Alshaya, on peut rencontrer un baladin à la recherche de son amant et dans Le rire de Gorulga, on incarne une reine amazone lesbienne. Dans la prochaine, D'écume et de sang, on pourra visiter un bordel et y passer un bon moment avec une femme, un homme, ou les deux, le lecteur aura le choix.
J'écris ainsi déjà par goût personnel : pour moi, la nudité est naturelle, de même que le sexe, il n'y a rien de vulgaire ou de sale, de honteux pour moi dans une paire de fesses ou de seins, un pubis ou un pénis et ses testicules. On est tous sortis d'un sexe de femme, on a tous une bite ou une foufoune et le sexe fait partie des choses de la vie, je vois pas ce qu'il y aurait de répréhensible ou dégradant là-dedans. J'étais resté stupéfait avec Retour à Griseguilde où beaucoup m'avaient parlé du fait que le héros pouvait coucher avec Yatéli, la serveuse de taverne, comme si c'était quelque chose d'extraordinaire... Je respecte toutefois la sensibilité du lecteur (ou de la lectrice) : rien n'est imposé, à chaque fois c'est un choix et si le lecteur est gêné, il peut simplement passer à côté et poursuivre.

Mais je m'éloigne du sujet, pardon Lowbac. Pour répondre à ta question, pour trouver des orientations sexuelles moins courantes en livre-jeu, c'est donc vers les AVH qu'il te faudra te tourner. Les LDVH de l'époque ne t'apporteront rien de ce côté-là, étant déjà totalement asexués (à l'exception de la saga du Prêtre Jean où l'on peut faire crac-crac).
Pour Echappez-vous de Fire Island, ça me fait sourire : Fire Island dans les années 1970 était une oasis de la communauté gay, un havre de tranquillité où les hommes aimant les hommes pouvaient se retrouver et vivre leurs amours en (quasiment) toute tranquillité dans un cadre naturel superbe. Pas sûr donc qu'un personnage gay ait envie de s'en échapper (rires).

Il n'y a pas vraiment de zoophilie non plus dans les livres-jeux...
bon, je ne sais pas si ça compte dans les orientations sexuelles (mais si c'en est pas une, je sais pas ce que c'est).

Rectification: au mini-Yaz cette année on a eu une AVH de sunkmanitu que je vous recommande fort !

Et dans "Une journée à l'hôpital" il me semble me rappeler l'évocation de pratiques nécrophiles.

Perso, j'ai du mal à considérer zoophilie et nécrophilie comme des "orientations" sexuelles. C'est quelque chose qui est au-delà de ma compréhension, de mon entendement je dirais.

Autant écrire un ou plusieurs paragraphes de sexe ou d'intimité entre hommes, entre femmes ou entre hommes et femmes ne me dérange pas, autant je me vois pas proposer au héros dans une AVH d'enculer une chèvre ou de se taper un cadavre...
Après, un auteur comme Clark Ashton Smith parle de nécrophilie dans Les nécromants ou La mort d'Ilalotha mais là, c'est du roman, l'impact n'est pas le même pour le lecteur (ce qui ne m'a pas empêché d'être dérangé par ces passages).

Voyageur Solitaire a écrit:

Les LDVH de l'époque ne t'apporteront rien de ce côté-là, étant déjà totalement asexués (à l'exception de la saga du Prêtre Jean où l'on peut faire crac-crac).

Quelques scènes de Loup*Ardent étaient pas mal aussi ^^

Je n'irai pas jusqu'à dire que le prochain EB pourrait ne pas être étranger au sujet, mais bon.

Après, pour les AVH, je pense qu'il y a un équilibre à trouver, pour éviter de proposer telle ou telle chose uniquement parce que c'est "tendance".
Si on prend les jeux-vidéos par exemple, il y a clairement une volonté de toucher une audience plus large. Les studios se sont rendus compte que beaucoup de joueurs étaient des femmes, y compris sur des jeux où on ne les attendait pas comme GTA ou Skyrim par exemple (fréquentant des forums consacrés à ces jeux, j'ai moi-même au début été surpris par le nombre de joueuses). D'où certainement cette possibilité désormais généralisée de choisir un personnage masculin ou féminin et de pouvoir le "customiser" à son goût. Même Assassin's Creed s'y est mis, depuis Odyssey on peut incarner un homme ou une femme, aimer les hommes ou les femmes. Je ne doute pas de l'engagement sincère de certains studios (Les Sims proposent cette possibilité depuis bien longtemps) mais je pense quand-même qu'il y a d'autres enjeux derrière, toucher et attirer un public plus large. Un joueur gay sera certainement enclin à jouer à un jeu qui lui permet d'incarner un personnage comme lui et pareil pour une joueuse qui appréciera d'incarner une femme. Après, ce n'est pas une règle absolue non plus.

Pour les AVH donc, je pense qu'offrir des possibilités peu courantes doit rester équilibré. Si c'est pour faire tendance parce que c'est dans l'air du temps, mouais... Et si c'est trop appuyé, on s'éloigne du plus grand nombre et autant se tourner alors vers un lectorat spécifique, bien précis. Perso, j'essaie de toujours laisser le choix au lecteur. Dans Le rire de Gorulga, c'est vrai, j'ai imposé une héroïne qui aime les femmes mais c'est dans un cadre bien précis : on incarne la reine des amazones, société féminine où la femme est supérieure, l'homme inférieur réduit aux tâches subalternes. Toute la culture et l'histoire de l'héroïne lui ont inculqué dès sa naissance que seules les femmes comptent, ce qui peut justifier (si tant est qu'il y ait besoin de justifier quoi que ce soit) que ces femmes s'aiment entre elles. Et il y a des exceptions parmi elles, comme partout (Tananda, leur précédente reine, aimait les hommes et était tombée amoureuse du héros dans le premier tome de la trilogie).

Après, j'aurais fait l'inverse, j'aurais imposé un héros homosexuel, je me demande comment ça serait passé...

Toutes tes AVH citées chez quel(s) éditeur(s) sont-elles trouvables ; ?

Dans l'avh "7" l'éros le héros peut être hétéro, homo ou éventuellement bi selon la volonté du lecteur ;-)

ALIN V a écrit:

Dans l'avh "7" l'éros le héros peut être hétéro, homo ou éventuellement bi selon la volonté du lecteur ;-)

& cela a-t-il une incidence sur le déroulé de l'histoire ;.

http://litteraction.fr/livre-jeu/7 je la lirais dans la semaine ; ayant du DC à voir en plus sur Salto.

En tout cas sur un PFA......

@ Lowbac : de mon côté, tout est sur Litteraction pour l'instant. Ma trilogie a pris du retard pour sa sortie en livres, avec le Covid d'abord, avec les problèmes de matières premières (dont le papier) maintenant.

Je trouve intéressant que le fait d'incarner un homme ou une femme, d'aimer un homme ou une femme, ait une incidence sur l'histoire d'une AVH ou d'un LDVH. Il y avait eu une tentative dans Les messagers du temps où l'on pouvait choisir d'être une femme ou un homme mais au final, ça ne changeait pas grand-chose, sinon rien.
Mais si le fait d'être une femme par exemple implique d'autres rencontres, d'autres réactions de la part des PNJ, un autre chemin, ça devient intéressant. Après, en tant qu'auteur homme, ce n'est pas toujours évident d'envisager son personnage d'un autre sexe. Il ne suffit pas de féminiser les mots, de mettre un "e" à la fin d'un adjectif pour rendre le fait d'incarner une femme. Une femme ne réagira pas de la même manière qu'un homme (et inversement) devant telle situation, tel PNJ ou dans tel endroit. Encore plus avec un héros qui aime les hommes ou une héroïne qui aime les femmes. Niveau écriture, c'est un vrai défi pour que ça paraisse crédible, pour éviter de tomber dans la caricature.

Enfin, c'est compliqué également si on est dans une AVH historique : il faut alors tenir compte de la mentalité de l'époque décrite.
Il y a eu un temps (qui dure encore malheureusement) où la femme était cantonnée à certaines tâches, se voyait interdites certaines choses. Si on écrit une AVH historique réaliste et qu'on propose d'incarner une femme, il faut en tenir compte. A moins justement d'incarner une femme qui lutte pour améliorer la condition féminine par exemple.
Pareil pour un personnage homosexuel : à certaines époques, cela restait caché, mal vu ou interdit (aujourd'hui aussi d'ailleurs) et là aussi, dans le cadre d'une AVH historique, il faut en tenir compte. Un véritable défi d'écriture.
Après, dans un monde imaginaire où ça ne gêne personne, c'est évidemment plus facile.

Dans Cyclades j'y suis allé de ma séquence homosexuelle masculine mais on ne tombe pas forcément dessus (non, pas Mykonos).

Ah, et maintenant ça me revient, dans l'Avh Prisme de Merlinpinpin, on a une très chouette scène homosexuelle féminine.

Fitz a écrit:

Dans Cyclades j'y suis allé de ma séquence homosexuelle masculine mais on ne tombe pas forcément dessus (non, pas Mykonos

Ah, j'ai raté ça... Ce sera l'occasion de la relire, tiens.

Rien d'officiel mais il y a aussi le délire autour de la relation Loup-Solitaire/Banedon

Gagadoth a écrit:

Rien d'officiel mais il y a aussi le délire autour de la relation Loup-Solitaire/Banedon

Des allusions même voilées dans des livres de la série seraient-elles possibles dues à des traducteurs coquins

Gagadoth a écrit:

la relation Loup-Solitaire/Banedon

Une bien belle histoire d'amour...

Je ne vois pas d'orientation sexuelle prononcée dans les livres-jeux en général (enfin, ceux que j'ai lu). A part un tout petit peu avec Loup Ardent.

Ces livres sont en majorité d'abord destinés à des enfants ou pré-ados de toute façon.

Xav'

P.S : et puis ça permet à n'importe qui de s'approprier le héros quand il est asexué. C'est bien comme ça.

Dans la version Inkle de Sorcellerie, Letorve devient plus qu'un ami pour le héros ou l'héroïne si on développe une relation avec lui. Et il n'y a aucune différence selon qu'on choisisse un homme ou une femme au départ, donc on peut considérer ce personnage comme bi.