66 ans après sa disparition, Hitler se réveille dans un terrain vague de Berlin. Et il n'est pas content: comment, plus personne ne fait le salut nazi? L'Allemagne ne rayonne plus sur toute l'Europe? Depuis quand tous ces Turcs ont-ils pignon sur rue? Et surtout, c'est une FEMME qui dirige le pays?
Il est temps d'agir. Le Führer est de retour et va remettre le pays dans le droit chemin. Et pour cela, il lui faut une tribune. Ca tombe bien, une équipe télé, par l'odeur du bon client alléchée, est toute prête à lui en fournir une.
Timur Vermes, né à Nuremberg en 1967, est né de mère allemande et d'un père juif hongrois réfugié en Allemagne. Qui mieux que lui pouvait nous livrer cette fiction géniale? 1,5 million d'exemplaires se sont écoulés outre-Rhin pour ce premier roman, un coup magistral.
J'avoue: j'ai ri. Du début à la fin. Voir Hitler s'interroger sur la qualité de l'uniforme allemand lorsqu'il croise de jeunes punks venus à son secours; le voir découvrir la télévision moderne, ou l'usage des PC; le voir s'échiner à trouver un exemplaire du Völkischer Beobachter... désopilant, le tout servi par une plume alerte et fort bien traduite.
Quelques moments savoureux comme lorsqu'Hitler démontre par A+B que les Verts seraient un de ses meilleurs alliés pour la conquête du pouvoir; ou lorsqu'il donne sa première interview au Bild.
Je vous offre un de ces moments délicieux:
"Le plus stupéfiant restait quand même la situation actuelle de l'Allemagne. A la tête du pays se trouvait une femme lourdaude, aussi charismatique qu'un saule pleureur, et dont l'action était d'emblée discréditée par ses 36 années de collaboration bolchevique. Elle avait fait alliance avec les buveurs de bière de la Bavière, pitoyable copie du national-socialisme..."
Le plus dérangeant? J'ai fini par trouver le personnage sympathique... Effrayant, mais le décalage systématique entre son discours et les situations dans lesquelles il se trouve en fait un personnage presque burlesque que l'on adore détester. C'est sans aucun doute une volonté délibérée de l'auteur, comme le confirment les derniers mots du livre:
"Dans ce cas, je pourrai profiter de l'élan de mon nouveau livre et de la nouvelle émission pour me lancer dans une offensive et fonder un mouvement. Sawatzki m'a d'ailleurs envoyé quelques projets d'affiches sur mon téléphone mobile (...) le slogan dit ceci: "Tout n'était pas mauvais.". Ca permet d'avancer."